
Mr X : « Et c’est sur quoi ton doctorat ? ».
Vous : « c’est sur… euh… et blablabla… et blablabla… »
Mr X : « Hein ?… j’ai rien compris »
Si vous avez parfois ce genre de conversations… c’est normal.
Raconter de façon claire ce qu’on fait, ce n’est pas facile.
Aujourd’hui, j’ai la chance d’avoir interviewé le champion du monde 2021 de MT180, Yohann Thenaisie.
Yohann est doctorant en neurosciences à l’Université de Lausanne…
… et a gentiment accepté de nous livrer 11 conseils de communication scientifique.
(je vous conseille d’aller voir sa vidéo sur la maladie de Parkinson, il est vraiment impressionnant ! – et ce sera plus facile de comprendre la suite de ce billet).
Si vous êtes plutôt intéressé par :
- le storytelling: allez voir les conseils #1, #2,… jusqu’à #5
- la gestion du stress devant le public : sautez directement aux conseils #5, #6, … jusqu’à #11.
C’est parti !
#1 Racontez une histoire avec des émotions
Yohann aurait pu commencer sa présentation par :
« 100 000 personnes souffrent de la maladie de Parkinson… »
Au lieu de ça, il a nous a raconté l’histoire de :
« son vieux prof de musique, ayant du mal à marcher, atteint de la maladie de Parkinson ».
Évidemment, on est bien plus captivés par la seconde accroche.
Pourquoi ?
Il y a deux raisons naturelles à cela :
1/ on aime bien les histoires
2/ on aime bien les émotions.
Combinez les deux… et votre public sera séduit.
La seconde accroche réussit cela parfaitement :
- Yohann est un jeune garçon, son prof de musique a un problème, il doit être sauvé (= histoire)
- Son prof est malade, le jeune garçon va le sauver, c’est touchant (= émotion)
La première approche, au contraire, est purement statistique.
Trop froide, trop pauvre en émotion.
Et du coup « ce n’est pas parlant » pour le public.
Ajouter de l’émotion, c’est un peu contre-intuitif, parce qu’on est habitués à faire de la recherche factuelle…
… mais c’est très utile pour transmettre votre message.
#2 Construisez votre histoire en 3 temps
Le schéma classique en 3 temps, c’est :
1/ Commencez par une accroche.
Une anecdote personnelle, une citation un peu « catchy », une question au public.
Dans la cas de Yohann, c’est un truc personnel, auquel il ajoute une pointe de mystère pour maintenir le suspense : « un professeur pas comme les autres ».
2/ Abordez le problème : le professeur a la maladie de Parkinson.
Puis, comment vous allez résoudre votre problème : en mettant en place une intelligence artificielle qui fait de la stimulation cérébrale.
3/ Concluez l’histoire : l’astuce, c’est de finir l’histoire avec le même sujet qui nous a fait commencer.
Ici, c’est le prof, qui est finalement guéri.
#3 Utilisez des métaphores
Yohann aurait pu nous parler de la dopamine comme d’un :
« neurotransmetteur qui permet la communication au sein du système nerveux »
Au lieu de cela, c’était :
« Maestro dopamine, qui coordonne les musiciens (= les neurones) »
Utiliser la métaphore de la musique, c’est beaucoup plus joli.
Vous « omettez » les détails scientifiques un peu compliqués.
Et le message « passe mieux » auprès du public.

#4 « Ne partez pas dans tous les sens »
Une de mes questions à Yohann, c’était :
« Dans notre histoire, comment on choisit ce qu’on garde, et ce qu’on élimine ? »
Yohann m’a répondu très simplement :
« Ne partez pas dans tous les sens.
Concentrez-vous UNIQUEMENT sur le message à transmettre.
Et supprimez tout le reste. »
Dans son cas, le message, c’est :
« Je connecte l’IA au cerveau des gens atteints de la maladie de Parkinson pour les aider à mieux marcher »
Chaque phrase, chaque mot de son histoire sert à « faire passer ce message ».
Et tout le reste, il n’en parle pas.
Par exemple, Yohann aurait pu parler des troubles du sommeil liés à Parkinson.
Ou encore des effets secondaires de la prise de dopamine, etc.
C’est intéressant… mais au final ça « embrouille » le message principal.
Et du coup, il vaut mieux le laisser de côté.
#5 Le texte d’abord, les slides ensuite
Pour nos présentations, on construit souvent nos slides, puis… on pense à ce qu’on va dire après.
Yohann recommande… de faire l’inverse ! (histoire d’abord, slides ensuite).
Pourquoi cet ordre ?
Car l’essentiel se trouve dans ce que vous racontez.
J’ai participé à une vingtaine de conférences et les speakers les plus captivants, c’était …
… ceux qui avaient « bien bossé » leur storytelling.
Pas ceux qui avaient simplement une belle image.
Évidemment, ce n’est pas une raison pour « négliger » vos slides.
La recommandation de Yohann, c’est de « faire des slides minimalistes, pour guider l’attention du spectateur ».
Du genre : seulement une image, ou seulement un graphe.
#6 Relaxez votre corps
Yohann avait un rituel de préparation avant sa présentation.
Il se concentrait sur son corps.
Et en particulier, sur sa respiration.
Par exemple, il recommande de faire des inspirations lentes avec le ventre.
Puis d’expirer lentement.
Un autre conseil de Yohann, c’est de se masser le cou, les pieds, le visage, etc. avant votre présentation.
Votre sang va mieux circuler, et ça va vous énergiser.
Vous pouvez trouver plein de tutos, par exemple sur Youtube.
L’avantage : en écoutant votre corps, vous allez moins penser à la présentation à venir.
Et vous allez vous sentir plus détendu.
J’ai personnellement essayé ce truc, et la première fois, j’étais un peu sceptique.
Pourtant, je vous garantis que l’effet est vraiment spectaculaire.
On se sent mieux instantanément, presque par magie.
#7 Ayez une bonne posture
Yohann commence généralement par ancrer ses pieds dans le sol, en les écartant à peu près à la largeur de son bassin.
Pensez par exemple à l’image d’un arbre enraciné dans le sol.
Ensuite, laissez vos bras détendus le long du corps, épaules relâchées.
Vous aurez une position stable.
Vous serez beaucoup plus détendu.
Et vous prendrez confiance en vous.
Au contraire, si vous vous balancez d’une jambe à l’autre (= position instable), alors vous serez moins confiant.
#8 Ayez le bon état d’esprit
Selon Yohann, vous pouvez adopter deux états d’esprit avant votre présentation :
Soit : « les gens vont me juger ».
Soit : « y’a des gens qui viennent pour m’écouter, j’ai un truc à leur partager ».
Dans le second cas, vous avez une approche positive.
Vous aurez une connexion avec le public.
Vous vous en faites un allié.
Et vous vous sentirez naturellement mieux.
De manière générale, formulez des affirmations positives, du style : « je vais réussir », « je suis détendu ».
Plutôt que des formulations négatives, genre « je NE vais PAS rater », « je NE suis PAS stressé », etc.
Ça vous aidera à être plus à l’aise sur scène.
#9 Cherchez la connexion avec le public
Vous avez déjà assisté à une présentation un peu monotone, pas très vivante ?
Le speaker est coupé des gens, comme s’ils n’existaient pas.
On sent que le texte est bien préparé, mais on ne vibre pas.
Le secret d’une bonne présentation, c’est de vivre votre texte.
Et ça, on le voit quand vous arrivez à vous connecter au public.
Quand vous vous adressez sincèrement aux gens qui sont en face de vous.
Dans sa présentation, Yohann va même plus loin : il s’adresse directement à un membre du jury et dit : « Prenez un patient volontaire et bien éveillé ».
Ce n’est pas facile de se connecter au public… mais c’est une des clés d’une présentation réussie.

#10 Préparez votre texte, et testez votre présentation
Il n’y a pas de secret :
« mieux vous êtes préparé, moins vous serez stressé ».
Soyez un expert à propos de vos résultats, de vos méthodes, des chiffres que vous citez, etc.
Maîtrisez votre sujet.
Yohann était archi-préparé pour MT180 :
« chacun des mots était écrit, chacune des respirations était plaquée, tous mes gestes étaient calés. »
[N.B. pas besoin de préparer à ce point pour une présentation normale dans une conférence, ça serait impossible.]
Autre conseil : testez votre présentation sur quelqu’un avant de la présenter à l’audience.
Au moins une fois.
On va vous dire :
« là j’ai pas compris, qu’est-ce que c’est ça ? ».
Et vous pourrez améliorer votre texte.
Enfin, Yohann recommande également de demander un feedback à quelques personnes du public, après votre présentation.
Par exemple : « qu’avez-vous retenu de mon talk ? »
Ça aussi, ça vous aidera à vous améliorer pour vos prochaines présentations.
#11 Faites-vous coacher
5.
C’est le nombre de coachs que Yohann a eu durant toute son « aventure MT180 ».
Un coach en storytelling, une coach comédienne, une coach journaliste, un coach spécialisé en design, une sophrologue.
Bon, soyons honnête, c’est assez exceptionnel d’avoir un tel encadrement – en Suisse, les doctorants ont la chance de bénéficier de nombreuses formations via l’organisation CUSO.
Mais l’idée, c’est qu’il y a certains trucs que vous n’apprendrez pas avec ce simple article de blog.
Et qu’un coach fera une vraie différence pour muscler votre communication.
Pourquoi ne pas suivre une formation (les universités en organisent parfois), ou prendre des cours de théâtre ?
L’important, c’est de pratiquer, tout en étant bien encadré.
Courage !
#Le conseil bonus : trouvez du plaisir
« Trouver du plaisir à parler de ce que vous faites. »
Si Yohann n’avait qu’un seul conseil à vous donner, ce serait celui-là.
Parce que ça se voit tout de suite si vous n’aimez pas trop ce que vous faites.
Évidemment, ce n’est pas toujours facile d’y arriver.
Ça prend du temps de construire une belle histoire.
L’objectif, c’est de travailler votre histoire pour la rendre agréable pour soi et pour les autres.
Pour découvrir le parcours de Yohann :
Son site web.
Et vous, est-ce que vous avez d’autres conseils pour améliorer votre communication scientifique ?
Votre thèse n’avance pas comme vous voulez ?
Comment organiser vos idées, éviter le syndrome de la page blanche, (re)trouver la motivation, … ?
Ne restez plus bloqué(e) :
réservez votre coaching gratuit
↓
0 commentaires